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Comment organiser la prévention pour lutter contre l’absentéisme ?

L’absentéisme n’est pas une fatalité ! Preuve en a été donnée le 1er décembre à Bordeaux, lors du dernier Club RH de La Gazette de l’année, dont la MNT était une nouvelle fois partenaire. Particulièrement riches, les retours d’expériences et analyses des différents intervenants ont fourni de nouvelles pistes de réflexion et d’action aux professionnels des ressources humaines pour mieux organiser la prévention.

Publié le 08-12-2022

Premier Plan Santé au travail dans la fonction publique, réforme de la médecine professionnelle, nouvelles dispositions pour le reclassement des agents reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions… l’année 2022 aura été fertile en matière de prévention des risques professionnels. Mais comment organiser le système d’acteurs ? Comment renforcer la prévention primaire ? Comment éviter la désinsertion professionnelle et favoriser la qualité de vie au travail (QVT)... pour, au final, réussir à faire baisser l’absentéisme ? La question a été posée aux intervenants du Club RH de La Gazette, organisé le 1er décembre en partenariat avec la ville et la métropole de Bordeaux, avec le soutien de la MNT.

L’absentéisme comme indicateur

En ouverture de la rencontre, Michel Vayssié, directeur général des services de Bordeaux Métropole, citant le psychologue du travail Yves Clot, a rappelé la nécessité de « soigner le travail » si l’on veut guérir les agents. « Le travail est malade des processus, de nos modes de managements, de notre organisation », a-t-il souligné, préconisant d’être « attentif aux signaux faibles ». Nicole Rascle, professeure de psychologie de la santé à l’université de Bordeaux, est intervenue dans son sillage pour présenter une analyse de l’absentéisme comme indicateur en matière de risques psychosociaux (RPS).

Elle a notamment expliqué que le harcèlement, le manque soutien, l’insécurité professionnelle et le « conflit » travail-famille chez les femmes ont une influence sur le nombre jours d’absence. Tandis que le manque de latitude décisionnelle, le travail à temps partiel et le manque de promotion en impactent la durée. Les arrêts courts sont à associer à une stratégie de retrait ou de récupération. Le niveau d’absence est par ailleurs conditionné par le type d’engagement dans le travail (affectif, moral ou contraint). Les charges familiales et le management jouent aussi.

Soigner le retour au travail

En conclusion de son intervention, Nicole Rascale a avancé trois pistes d’action pour prévenir l’absentéisme :

  • la flexibilité du temps de travail,
  • l’adoption d’un management habilitant (participation aux décisions, information, coaching)
  • et la systématisation d’un accompagnement lors du retour au travail. Un dernier point, repris par plusieurs autres intervenants.

Vincent Lescaillez a expliqué comment la ville et de la métropole de Bordeaux, dont il est directeur général ressources humaines et administration générale, aborde la prévention et la santé au travail à travers une approche globale, intégrant les contraintes personnelles des agents et leur environnement de travail. La collectivité a créé en interne une « Mission qualité de la relation professionnelle », chargée de garantir un environnement professionnel stable d’un point de vue émotionnel. La cellule « RPS » permet quant à elle de croiser les approches. Magalie Sabbah, directrice des ressources humaines de la ville et de la métropole de Bordeaux a complété son propos en soulignant les opportunités offertes par le décret relatif aux services de médecine de prévention dans la fonction publique territoriale et « l’importance d’avoir une équipe pluridisciplinaire pour travailler en transversalité ».

Culture de la prévention

Elodie Portelli, directrice générale des services de la ville de Mérignac, a exposé la démarche d’amélioration des conditions de travail engagée au sein de sa collectivité, avec le soutien de l’ARACT. « Nous avons commencé par établir une méthode de calcul de l’absentéisme en choisissant celle du benchmark de l’association des DRH des grandes collectivités », a expliqué Elodie Portelli. Un plan d’actions a été défini permettant de connaître et suivre l’absentéisme, de communiquer sur le sujet, de responsabiliser l’encadrement, de réduire la pénibilité et de renforcer la culture de la prévention.

Les 70 000 € « d’économies » réalisées avec le jour de carence ont permis de financer l’achat d’équipements et des remplacements d’agents. La collectivité mobilise aussi la période de préparation au reclassement, grâce notamment à un partenariat avec une autre collectivité. « Nous avons un dispositif multifactoriel, avec une revue régulière des situations individuelles dans les directions », a signalé Elodie Portelli.

Dynamique positive

Selon Matthieu Girier, directeur des ressources humaines du CHU de Bordeaux, il faut « développer une palette de réponses pour couvrir toutes les situations car les déterminants ne sont pas les mêmes pour tous les agents ». Son établissement a fait le choix de ne pas « s’attaquer à l’absentéisme » mais de « favoriser une dynamique positive pour donner envie de venir travailler ». Chaque direction a son propre plan d’actions et chaque équipe peut présenter des projets d’amélioration, avec à la clé des primes. La direction « Qualité de vie au travail » traite de la question de l’équilibre vie privée-vie professionnelle.

Emmanuelle Charroin, responsable de l’Unité Mobilité Santé du CHU de Bordeaux, a complété son propos en présentant les missions de son équipe, dont le rôle est de gérer toutes les absences pour raison de santé, en travaillant en particulier sur « le lien ». « Je reçois les agents et les rassure. Nous allons les voir sur leur poste, nous faisons de la détection de compétences pour la mobilité interne, nous pratiquons des immersions », a précisé Emmanuelle Charroin.

Équipe pluridisciplinaire

Caroline Desaigues, directrice du centre de gestion de la Gironde, est venue quant à elle expliquer le rôle du CDG, à la fois acteur de la prévention au service des collectivités et de ses propres agents. La structure accueillera prochainement un doctorant pour travailler sur la santé mentale. Son offre de service sera également renouvelée en 2023 en lien avec l’évolution du contexte réglementaire. « Nous disposons d’une équipe pluridisciplinaire en mesure d’adapter les réponses aux besoins et spécificités de la collectivité », a-t-elle précisé.

Dominique Baradat, chargée de mission à l’ARACT Nouvelle-Aquitaine a conclu cette matinée du Club RH en rappelant la nécessité d’inscrire sa démarche dans une approche globale, intégrant notamment les maladies chroniques évolutives extra-professionnelles. « 20 % de la population française est concernée », a-t-elle précisé. Or, ces maladies sont génératrices d’absences si l’organisation du travail ne leur permet pas de prendre leur traitement ou d’en gérer les effets secondaires. « Cela renvoie à la question de la souplesse des organisations », selon Dominique Baradat pour laquelle ce sujet est « un enjeu fort de maintien dans l’emploi et de qualité de vie au travail pour tous. »

Crédits photo : GettyImages, MNT

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